Comment la construction de routes participe à la propagation d’espèces exotiques envahissantes telles que l’Ambroisie trifide (Ambrosia trifida) ? Dans une étude récente publiée dans Science of the Total Environment, des chercheurs ont exploré l’impact des travaux routiers sur l’introduction et la dissémination de cette espèce, en analysant des données issues de plusieurs projets de construction.
L’Ambroisie trifide, espèce invasive originaire d’Amérique du Nord, représente une menace croissante pour la santé publique et l’agriculture, notamment en région Occitanie où sa présence ne cesse de s’étendre.
Construction des routes et espèces exotiques envahissantes
Les routes, par leur construction et leur entretien, perturbent gravement les écosystèmes. Cette perturbation ouvre la voie à l’installation rapide d’espèces envahissantes comme l’Ambroisie trifide. L’étude a analysé 41 projets de construction routière à partir de 444 rapports d’évaluation d’impact environnemental (EIA) et a identifié 137 espèces exotiques, dont 120 ont été introduites pendant les travaux.
Parmi les caractéristiques des routes étudiées, certaines se sont révélées être des facteurs majeurs d’augmentation de la richesse en espèces exotiques. Par exemple, une corrélation positive significative a été observée entre la largeur des routes et l’introduction de nouvelles espèces exotiques (r = 0,32), tandis que la longueur des routes était corrélée à la richesse totale des espèces envahissantes (r = 0,52). En d’autres termes, plus une route est longue et large, plus elle attire et favorise la dispersion des plantes exotiques envahissantes.
Une composition évoluant au cours du temps
Au fil des travaux, la composition des espèces envahissantes change. Alors que les plantes vivaces dominent dans les premières phases, les espèces annuelles prennent progressivement le dessus à mesure que les perturbations augmentent. Cette transition s’explique par la capacité des plantes annuelles, comme l’Ambroisie trifide, à se reproduire rapidement dans des sols perturbés. L’étude montre que 88 % des sites étudiés présentent une augmentation de la richesse en plantes exotiques à mesure que les travaux avancent.
Trafic routier et dispersion des graines d’Ambroisie trifide
Une expérience réalisée sur six populations d’Ambroisie trifide a permis d’étudier comment ses graines se dispersent le long des routes après la construction. Les résultats montrent que les graines se déplacent principalement dans la direction du trafic des véhicules, avec une dispersion pouvant atteindre jusqu’à 10 mètres (cf. figure ci-dessous). Cette dynamique rend difficile le contrôle de l’ambroisie une fois qu’elle est installée près d’une route fréquentée.
Mesures de gestion proposées
Les chercheurs insistent sur la nécessité de prendre des mesures préventives dès le début des travaux. Parmi les recommandations : nettoyer régulièrement les véhicules de chantier pour éviter la dispersion des graines, stabiliser rapidement les sols perturbés avec des espèces locales, et surveiller les zones à risque pour empêcher une implantation durable des ambroisies.
Conclusion
L’Ambroisie trifide profite largement des infrastructures humaines, notamment des routes, pour se répandre. Les caractéristiques des routes, comme leur largeur et leur longueur, amplifient ce phénomène. Cela met en lumière l’importance de la prise de mesures de gestion précoces.
Sources
Deokjoo Son, Yeounsu Chu, Hyohyemi Lee, « Roads as conduits for alien plant introduction and dispersal: The amplifying role of road construction in Ambrosia trifida dispersal », Science of The Total Environment, Volume 912, 2024, 169109, ISSN 0048-9697, https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2023.169109.
Pour aller plus loin
Document de consultation des entreprises lors de travaux d’aménagement ou d’entretien (CCTP, CCAP, BPU) : ce document a pour objectif la prise en compte des risques liés à la présence d’ambroisie dans les documents de consultation des entreprises pour les travaux d’aménagement ou d’entretien.